Actualité·TRIBUNE DES MEMBRES

La Macron-Économie, enfant naturel de la Hollandie

Article initialement publié sur le FigaroVox le 9 février 2017.

Alors que Macron se défend de ne pas avoir de programme économique, Benjamin Masse-Stamberger, membre du Comité Orwell, note que les propositions du candidat d’En Marche s’inscrivent dans le droit fil du pacte de responsabilité, du CICE ou de la loi Travail.

Emmanuel Macron est accusé de ne pas avoir de programme. Il est vrai que, pour l’heure, il a privilégié les postures christiques et les généralités bien-pensantes plutôt que la déclinaison de mesures concrètes, qui donneraient prise à la discussion, voire même – qui sait ? – à la critique. Le candidat d’En Marche ! s’est défendu avec véhémence de ne pas avoir de projet, en particulier en matière économique. « Je ne laisserai personne dire qu’il n’y a pas de projet. Il y a un projet qui est décliné avec beaucoup de précision », a-t-il martelé, lors du JT de TF1, le 1er février dernier.

Voyons voir : s’il est loin d’avoir décliné un programme complet, Macron a bien présenté un certain nombre de mesures-phares, emblématiques du renouvellement qu’il prétend incarner. Or c’est là que le bât blesse : si l’on regarde de près ces mesures, on constate que la plupart d’entre elles ont déjà été appliquées – ou pour le moins initiées – sous le quinquennat de François Hollande !

Exemple sur le temps de travail : Emmanuel Macron a déclaré ne pas vouloir sortir des 35 heures. « Il y a des secteurs où les 35 heures, ça marche ! C’est bon à la fois pour les salariés et pour l’entreprise », a-t-il assuré. En revanche, il souhaite pouvoir les appliquer de manière différenciée en fonction des secteurs et des types d’entreprises. Avec la possibilité de renvoyer à l’accord de branche ou d’entreprise, pour donner davantage de souplesse. Cela ne vous rappelle rien ? Oui, on reconnaît bien là l’esprit de la loi El-Khomri, mise en œuvre par le gouvernement de François Hollande, lorsque Macron était à Bercy. Cette évolution du temps de travail, rendu plus flexible, serait ainsi, a-t-il lui-même reconnu sur France Inter, « dans l’esprit de ce qui a été commencé dans la ‘loi Travail’ ».

Même chose concernant la baisse des charges. Le candidat Macron veut poursuivre et prolonger le Crédit d’impôt sur la compétitivité emploi (CICE), voué à devenir un allègement de charges durable, étendu à un plus grand nombre d’entreprises. Seul problème : selon toutes les études, le CICE n’a pas produit l’effet escompté en termes de créations d’emplois, surtout si on le met en regard des sommes dépensées. Ainsi, selon le Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques (LIEPP) de Sciences Po Paris, qui figure parmi les deux institutions chargées d’évaluer l’impact du CICE : « L’évaluation indique que [le CICE] n’a pas incité les entreprises les plus intensément ciblées à investir ou à embaucher plus que les [autres] entreprises. »

Enfin, Macron a affirmé vouloir « supprimer la totalité des charges au niveau du SMIC. » Là encore, rien de vraiment nouveau sous le soleil, puisque la mesure était déjà prévue… dans le Pacte de responsabilité, également mis en place sous le quinquennat de Hollande !

Les principales grandes mesures économiques défendues par Emmanuel Macron s’inscrivent, on le voit, dans le droit fil de la politique menée par l’actuel hôte de l’Élysée… – à moins bien sûr, que le leader d’En Marche ! n’ait gardé ses idées les plus « révolutionnaires » pour plus tard.

On ne peut guère s’étonner que Macron marche dans les pas de son mentor en économie : c’est le fils prodigue lui-même qui a inspiré une grande partie des propositions du candidat Hollande et mis en œuvre l’autre partie, en tant que Secrétaire général adjoint de l’Élysée, puis ministre de l’Économie. On est cependant contraint de rappeler que cette stratégie s’est soldée, in fine, par plus de 500 000 chômeurs supplémentaires sur le quinquennat. Mais nul doute que, touchée par la grâce d’Emmanuel Macron, la même approche permettra de transformer l’eau tiède du hollandisme en vin pétillant du plein-emploi !

 

6 réflexions au sujet de « La Macron-Économie, enfant naturel de la Hollandie »

  1. Allez expliquer ça aux Macronidolatres, je vous souhaite bien du plaisir. Ce type sait bien qu’il n’a pas besoin de développer un programme avant le second tour pour lequel les médias le donnent qualifié face à Marine Lepen. Après, il jouera le pacte républicain et il empotera l’élection haut la main. Ça s’appelle un Hold-up

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    1. Le pacte républicain? Vous rêvez!

      Il serait sans doute invoqué par les socialistes pour culpabiliser les électeurs de la droite et du centre, éventuellement privés de leur candidat, et qui seraient tentés par un vote « Bleu Marine ».

      Mais ce pacte opportuniste et illusoire aura volé en éclat si Fillon, victime des manœuvres d’un « quinquennat pour rien » et en phase terminale, aurait été contraint de renoncer in extremis.

      Voter alors pour Macron contre Marine Le Pen relèverait d’un masochisme morbide que, finalement, nul ne voudra expérimenter.

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  2. C’est possible et comme tout est possible, l’endroit autant que l’envers, je donne ma langue au chat. Mais cela dit, je pense qu’il n’y a rien de pire que de pas essayer. Que risque-ton à l’heure actuelle ?

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  3. Son programme il est là: http://ec.europa.eu/europe2020/pdf/csr2016/csr2016_france_fr.pdf
    Ce sont les GOPÉ du 18 mai 2016, en vertu de l’article 121 du TFUE. Macron a été le porte-flingue des GOPÉ 2014, El Khonri le porte-flingue de celles de 2015. Qui sera le porte-flingue de celles-ci ?

    Les GOPE, ce sont les «Grandes Orientations de Politique Économique». Plus précisément, ce sont des documents préparés par la direction générale des affaires économiques de la Commission européenne. Conformément à l’article 121 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), ces documents sont ensuite transmis au conseil Ecofin (c’est à dire à la réunion des ministres européens de l’économie et des finances), puis au Conseil européen (les chefs d’État et de gouvernement). Après validation, les GOPE deviennent des recommandations du Conseil aux pays de l’Union et font l’objet d’un suivi. Toujours selon l’article 121, «le Conseil, sur la base de rapports présentés par la Commission, surveille l’évolution économique dans chacun des États membres». Cette «surveillance multilatérale» est rendue possible grâce aux informations généreusement fournies par les États à la Commission. Bref, un joli petit traité de servitude volontaire que le Traité sur le Fonctionnement de l’UE.

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  4. Vous avez raison de vous méfier de cet illusionniste. Poursuivre dans la voie du socialisme nous conduirait à toujours plus de normes, de lois et de contraintes. Bref, notre liberté, largement entamée en mai 1981 et réduite ensuite à l’absence d’acquêts serait mise à néant. Il nous serait imposé de nous incliner devant le « Néant » du nouveau robespierrisme que le discours de Macron esquisse assez bien, entre brumes et nuages « new age ».

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  5. Ce qui m’intéresse personnellement le plus (et je ne suis pas le seul) c’est de savoir quelle est la dépendances idéologique et financière de E. Macron par rapport à l’oligarchie financière internationale, dont la BANQUE ROTHSCHILD est un des éminents représentants. S’il est, de ce fait favorable aux grands traités de libre échange transatlantiques. Et, s’il y est favorable, s’il considère que ces traités sont de la compétence de l’État français, ou s’il pense s’en remettre, pour leur négociation éventuelle, leur application et leur surveillances, aux structures bureaucratiques de l’Union Européenne.
    Incidemment, ce qui m’intéresse, c’est aussi de savoir si une alliance politique et économique avec la Russie et avec les BRIC est, pour E. Macron, un moyen stratégique efficace pour rétablir un équilibre entre l’Europe et les USA.
    La même question est d’ailleurs valable pour tous les autres candidats, y compris M. LePen.

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